Nyon

Le "mur" tombe, la vie repousse

Certains bâtiments racontent leur époque. Leur démolition aussi. Erigé en 1966, celui de la Suettaz, haut de 11 étages sur rez et isolé dans la campagne au nord des voies CFF, narrait l’idéal collectiviste mais aussi la pénurie de logements pour ouvriers. Les Nyonnais l’ont baptisé «mur de la honte», assez injustement puisque les habitants y ont toujours bien vécu.

Haut de 11 étages, le premier HLM nyonnais (la Suettaz) a été érigé en 1966
Haut de 11 étages, le premier HLM nyonnais (la Suettaz) a été érigé en 1966 - Copyright (c) DR
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Le premier HLM nyonnais est aujourd’hui en phase de démantèlement, ce qui raconte là encore les enjeux de notre époque. Usé, mal adapté aux exigences et aux attentes d’aujourd’hui, sa rénovation aurait coûté trop pour un résultat moindre. Aussi, les propriétaires (lire encadré) ont-ils choisi de remplacer ce grand «mur», et son voisin nommé Les Lupins (construit en 1974), par quatre bâtiments de 4 à 5 niveaux sur rez. De 248 appartements, le chiffre montera à 372. Les propriétaires, représentés par la Société coopérative d’habitation Lausanne (SCHL), ont d’ailleurs su séduire les locataires présents depuis le début du projet en leur assurant un relogement et un prix au m2 similaire, avec une hausse significative du confort, un respect des normes actuelles et avec un haut degré de performance énergétique.

Si bien que, lorsqu’un comité référendaire s’est constitué en 2019 pour contrer l’acceptation par le Conseil communal de Nyon du nouveau Plan de quartier, ces mêmes habitants ont eu de la peine à comprendre. Et l’ont fait savoir à la population, qui a balayé en 2020 par 62% ce référendum pointant notamment la coupe d’arbres. «Notre projet a toujours mis en avant la plantation en nombre de nouveaux arbres, qui fera plus que compenser la perte», détaille Patricia Rachovitch, cheffe de projet à la SCHL. Stéphanie Suard Dancet, architecte associée administratrice au sein du cabinet CCHE Nyon SA, confirme: «Nous avons favorisé la plantation de différentes essences avec des arbres majeurs en pleine terre. Les espaces extérieurs feront la part belle autant à la végétation qu’aux cheminements de mobilité douce, permettant de traverser un quartier verdoyant qui favorise la bio-diversité.»

Chantier complexe

Dans 3 des 4 bâtiments prévus, des loyers plus bas que le prix du marché seront proposésdiaporama
Dans 3 des 4 bâtiments prévus, des loyers plus bas que le prix du marché seront proposés

L’intrigue politique écartée, les travaux ont ainsi pu débuter. A commencer par la «découpe» d’un tiers de cette barre d’appartements, dans un geste de génie civil des plus impressionnants. «Construire les nouveaux bâtiments pour reloger les locataires tout en démolissant la barre existante est un vrai challenge. Mais nous démontrons que nous allons y parvenir», poursuit Stéphanie Suard Dancet. Le premier des quatre bâtiments (45 appartements) accueillera d’ailleurs des habitants dès ce printemps, dont une partie des per- sonnes ayant dû quitter le mal-nommé «mur de la honte». Ensuite arrivera la déconstruction du deuxième tiers de l’immeuble de 1966, qui permettra de finaliser la construction du second bâtiment. Et ainsi de suite jusqu’à fin 2027, date de la livraison totale du complexe situé à quelques mètres de l’hôpital.

Dans trois des quatre bâtiments, tous dotés d’une cour intérieure végétalisée et d’appartements majoritairement traversants, des loyers plus bas que le prix du marché seront proposés, selon les barèmes des Logements d’utilité publique (LUP). Dans le dernier de ces quatre îlots, les logements seront mis en vente en PPE, assurant là encore une mixité sociale. Les voitures, elles, seront interdites d’accès et devront se garer sur l’une des 454 places souterraines. Aussi, deux salles collectives seront à disposition des habitants et des vitrines destinées à l’activité professionnelle au rez-de-chaussée.

C’est ainsi qu’une barre de 11 étages, gouffre énergétique par ailleurs peu propice à l’interaction entre habitants, se transforme en un «campus» constitué de quatre îlots entourés de verdure. Le tout en maintenant les prix comparables pour que les anciens locataires s’y retrouvent. Un effort à saluer.

Les propriétaires

La reconstruction du quartier de la Suettazdiaporama
La reconstruction du quartier de la Suettaz

Les bâtiments A1 (La Hêtraie – 120 appartements) et A2 (La Pinède – 117 appartements) appartiennent à la société anonyme Logement social romand (LSR), active dans la construction de logements sociaux depuis des décennies. Le bâtiment B2 (La Chênaie – 45 appartements) est en mains de la Société coopérative d’habitation Lausanne (SCHL), qui assure le développement du quartier. Le quatrième bâtiment, le B1 (L’Érablaie – 90 appartements), propriété de la société industrielle Les Lupins, sera donc constitué de PPE.